LOI N° 15/015 DU 25 AOUT 2015 FIXANT LE STATUT DES CHEFS COUTUMIERS
La présente Loi fixe le statut des chefs coutumiers. Elle s’applique au :
Est chef coutumier, toute personne désignée conformément à la coutume locale, reconnue par les pouvoirs publics et chargée de diriger une entité coutumière.
Au sens de la présente Loi, il faut entendre par :
Le chef coutumier réside, selon le cas, au chef-lieu de la chefferie, du groupement ou dans son village.
Nul ne peut exercer les fonctions de chef coutumier s’il ne remplit les conditions suivantes :
L’exercice des attributions de chef coutumier est subordonné à :
Le pouvoir du chef coutumier prend fin dans les cas ci-après :
Dans ce cas, l’intérim et le remplacement du chef sont organisés conformément aux dispositions pertinentes de la section 5 du présent chapitre.
L’autorité coutumière est exercée par le chef coutumier. Celui-ci est assisté, le cas échéant, par des structures de consultation ou de concertation selon la coutume locale. Les chefs coutumiers peuvent créer des organisations civiles les regroupant dans le respect de la législation en vigueur.
Les chefs coutumiers peuvent être consultés, à tout moment, par les autorités publiques sur toute question relative à l’exercice du pouvoir coutumier.
Sans préjudice des prérogatives définies dans la Loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les provinces et de la Loi organique n° 10/011 du 18 mai 2010 portant fixation des subdivisions territoriales à l’intérieur des provinces, le chef coutumier assure la pérennité des coutumes et la bonne marche de sa juridiction. A ce titre, il exerce les attributions spécifiques suivantes :
Outre les cas prévus à l’article 7 de la présente Loi, l’intérim du chef coutumier intervient dans l’une des circonstances ci-après :
Sans préjudice des dispositions des Lois mentionnées à l’article 10 de la présente Loi, en cas de vacance, l’intérim est assuré, s’il échet, conformément à la coutume locale. L’intérim prend fin à la cessation de la circonstance qui l’a justifié.
En cas de vacance de pouvoir dans une entité coutumière, l’agent administratif le plus gradé de l’entité avise, par écrit, selon le cas :
En cas de vacance, le gouverneur de province ou son délégué pour la chefferie, le chef de chefferie ou de secteur pour le groupement, le chef de groupement pour le village, le bourgmestre pour le groupement incorporé, selon le cas, se rend sur le lieu et dresse le procès-verbal de constat de vacance de pouvoir coutumier.
Si le successeur est connu, l’autorité visée à l’article précédent autorise l’installation.
Dans le cas où le successeur n’est pas connu, l’autorité visée à l’article 14 de la présente Loi organise l’intérim et ouvre la voie à la succession. L’intérim du chef défunt est assuré, en tant qu’autorité coutumière, conformément à la coutume locale et tant qu’autorité administrative, conformément à la législation particulière en la matière.
Pour pourvoir à la vacance, l’autorité visée à l’article 14 de la présente Loi se rend sur le lieu et dresse les procès-verbaux ci-après :
Le chef coutumier a droit à des égards et au respect dus à sa dignité et à son rang.
Le chef coutumier a droit à une rémunération décente, aux frais de représentation et autres dus aux animateurs des entités territoriales.
Le chef coutumier bénéficie, en outre, des avantages suivants :
Le chef coutumier a droit à la protection sociale et à un passeport de service pour les missions officielles.
Le chef coutumier reçoit, lors de son investiture, un brevet, un drapeau et un insigne comportant les armoiries de la République.
Le chef coutumier affiche en tout temps et en toute circonstance un comportement digne.
Les chefs coutumiers se doivent respect mutuel. Toutefois, le chef coutumier d’une entité inférieure doit obéissance et déférence à celui d’une entité supérieure.
Le chef coutumier est apolitique. Il ne prend part à aucune activité dirigée contre les autorités publiques. Sous peine des sanctions disciplinaires, il peut assister, comme observateur, aux activités des partis politiques organisées dans sa juridiction.
Le chef coutumier règle les conflits coutumiers qui surgissent entre différentes communautés de son entité et en informe sa tutelle ou sa hiérarchie.
Le chef coutumier informe, selon le cas, l’autorité de tutelle ou hiérarchique lorsqu’il s’absente de sa juridiction pour une période inférieure à trente jours. En cas d’absence de plus de trente jours, une autorisation préalable est requise. Sans préjudice des formalités requises, la sortie du territoire national du chef coutumier est soumise à l’autorisation du Gouverneur de province.
Les poursuites et l’arrestation contre le chef de chefferie sont soumises au régime des articles 10 et 13 du code de procédure pénale. Sans préjudice des pouvoirs reconnus aux officiers de police judiciaire, et sauf infraction flagrante, les chefs coutumiers autres que le chef de chefferie, ne peuvent faire objet d’arrestation que sur mandat du ministère public.
Sans préjudice des dispositions de l’article 108 point 6 de la Constitution, la fonction de chef coutumier est incompatible avec celle de :
Les dispositions du point 6 ci-dessus ne s’appliquent pas au chef de chefferie, s’agissant du collège exécutif de la chefferie.
Le régime disciplinaire applicable au chef coutumier est fixé, selon le cas, par la Loi ou par la coutume locale.
Tout manquement du chef coutumier aux devoirs de son état, à l’honneur et à la dignité de ses fonctions constitue une faute disciplinaire passible, selon le cas, des sanctions prévues par la Loi ou par la coutume locale.
Dans ce cas, la procédure disciplinaire applicable est mutatis mutandis celle applicable aux agents de carrière des services publics de l’Etat. La déchéance est prononcée, selon le cas, par le ministre de la République ayant les affaires coutumières dans ses attributions pour le chef de groupement, par le gouverneur de province pour le chef de chefferie et par l’administrateur du territoire ou le bourgmestre pour le chef de village. Le chef coutumier frappé d’une condamnation irrévocable à une peine privative de liberté supérieure à trois mois pour infraction intentionnelle est déchu d’office de ses fonctions.
L’exercice illicite des fonctions ou prérogatives de chef coutumier est réprimé conformément au droit commun.
Les recours contre les sanctions encourues par le chef coutumier en matière coutumière sont organisés conformément à la coutume locale. Les recours contre les sanctions administratives sont exercés conformément à la procédure applicable aux agents de carrière des services publics de l’Etat.
Les conflits de pouvoir coutumier surviennent en cas notamment de :
En cas de conflit né à l’occasion de l’exercice du pouvoir coutumier, le gouverneur de province ou son délégué pour la chefferie, le chef de chefferie ou de secteur ou leurs délégués pour le groupement et le village s’impliquent de manière à contribuer à son règlement par voie de conciliation, de médiation ou d’arbitrage. Il peut être créé au niveau du secteur ou de la chefferie, de la province et du ministère de la République ayant les affaires coutumières dans ses attributions une commission consultative de règlement des conflits coutumiers.
La présente loi entre en vigueur à la date de sa promulgation. Fait à Kinshasa, le 25 août 2015